On peut se demander aujourd'hui si le genre monographique répond au
souci de rigueur d'une discipline qui a tendance à se reconnaître davantage dans une micro-histoire de l'art. Les deux parutions sur Vinci et Holbein le Jeune se distinguent toutefois par une même volonté de donner des deux peintres, déjà abondamment commentés, une image neuve. L'extraordinaire somme de Daniel Arasse (1) permet de se frayer un chemin dans cette nébuleuse insaisissable qu'est l'oeuvre de Léonard, à partir de ses écrits, en particulier du manuscrit découvert en 1967 à Madrid et qui jette une lumière inattendue sur l'artiste: «En une quarantaine d'années... Léonard a changé: il a rajeuni.»
Procédant à une sorte «de déchiffrement et de mise en ordre», l'auteur reprend les écrits en philologue, en historien des formes et en historien des idées. Les intérêts de Léonard (1452-1519), qui «semblent toucher tous les domaines de l'activité du savoir», sont avant tout conduits par son extraordinaire intuition, puisqu'il se disait lui-même «illettré», mais formalisés par la main, dessinant ou peignant. «La cohésion des intérêts de Léonard réside dans le mouvement qui les fait se déplacer d'un champ à un autre, d'une hypothèse à une autre; l'unité de ses oeuvres et de ses pensées tient à ce mouvement même.» Ce «Léonard en mouvement», il faut tenter de l'appréhender entre l'hydraulique et l'architecture, la musique et les mathématiques, l'invention de la bicyclette, du parachute, du scaphandre... et le trai