Julian Barnes est trop poli. L'écrivain franglais aime une France idéale, qu'il s'est créée au fil de ses livres et de ses vacances. Un pays de rêve sans HLM et sans chômage. Une France qui ne dérange pas. «Ce ne serait pas poli de parler des tensions raciales en France ou de Papon, sourit gentiment Barnes, je ne saurais pas quoi dire sur le procès de Bordeaux, c'est trop compliqué.»
La France lui rend bien cet amour sans orage. Julian Barnes est un Anglais parfait pour les émissions littéraires Barnes a fait Apostrophes et fera Bouillon de culture , les prix Barnes a eu le Médicis et le Fémina et les décorations Barnes est chevalier des Arts et Lettres. Son français impeccable est tout juste épicé par une pointe d'accent et Julian Barnes a une tête d'Anglais comme on les aime, grand, mince, blond, un peu coincé. «Je n'y peux rien si je ressemble à cette caricature», sourit l'auteur du Perroquet de Flaubert, élégant quinquagénaire rosissant à peine dans l'ombre de sa bibliothèque. Pas toujours dupe de son personnage, Julian Barnes reconnaît que, lorsqu'il dit une bêtise en France, on l'excuse d'un: «Ce n'est pas grave, cela doit être de l'humour anglais.»
Son dernier livre publié en français, Cross Channel (bizarrement traduit Outre-Manche), un recueil de nouvelles sur des Anglais vivant en France, est brillant et séduisant comme les autres romans de Barnes, mais il n'échappe pas aux conventions et aux idées reçues. «C'est une France de clichés qui s'adresse tout à fa