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Libération
Critique

Pingaud, la vie sans moi.Six nouvelles soignées qui débouchent sur une autobiographie avortée. Un objet littéraire non identifié de Bernard Pingaud . Bernard Pingaud. Tu n'es plus là. Seuil, 250 pp., 120 F.

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publié le 15 janvier 1998 à 16h11

«Travail soigné», on pouvait lire cette réclame à l'étal d'artisans

encadreurs, de stoppeuses de bas, de relieurs ou de bourreliers du temps que Bernard Pingaud était jeune homme à Paris. C'est ce qu'on pourrait écrire sur la couverture de son livre puisqu'il n'y figure ni le mot «roman», ni «récits», singulier ou pluriel, ni même «nouvelles», même si le mot se trouve, discret, au revers du volume, et puisque le travail de Tu n'es plus là est soigné, aux petits oignons, à l'ancienne. Du moins au début. Car le volume est incapable de revendiquer son genre pour la bonne raison qu'il en contient au moins deux, un recueil de nouvelles pour les deux premiers tiers,Tu n'es plus là, et un objet littéraire non identifié pour le reste, une sorte d'autobiographie avortée en 1979, et secouée dix-huit ans plus tard sans grand espoir de réanimation mais avec un grand souci de sincérité, Au commencement, pour en finir.

Les six nouvelles sont parfaites, d'une perfection déterminée, comme si seule cette excellence autorisait la forme improbable de ce qui suivra, comme s'il avait fallu à Bernard Pingaud faire la démonstration de sa qualité d'écrivain (la démonstration est évidemment patente depuis 1946 avec Mon Beau Navire) avant de dérouler légitimement l'autobiographie de celui qu'il nomme «le griffonneur». A Helsinki, un écrivain, ami d'André Frénaud (déjà l'autobiographie rôde), entend par hasard un concerto inconnu, voire imaginaire, sublime, de Mozart. A Luxembourg, un interprète voit au