Le Maine-Giraud, envoyé spécial.
Au petit musée Alfred de Vigny, dans son ancienne propriété, à une vingtaine de kilomètres au sud-ouest d'Angoulême, il y a un buste plutôt moche de l'écrivain entouré par une bouteille de cognac Maine-Giraud et par une bouteille de pineau de la même marque. Les cépages que l'écrivain administra ont perduré et font plus pour la fortune du lieu que l'ancienne salle à manger de Vigny, transformée en musée, et que la tourelle, appelée par Sainte-Beuve sa «tour d'ivoire», au sommet de laquelle demeure «la cellule» avec un simple lit où il allait pour travailler la nuit, y restant jusqu'au matin. Le Maine-Giraud («le maine» signifie «le manoir») reste comme le symbole de l'isolement actif de Vigny.
La propriété fut acquise en 1768 par le grand-père de l'écrivain. Celui-ci ne s'y rendit pour la première fois qu'en 1823, à 25 ans, chez une tante qui mourut quatre ans plus tard. Vigny devint propriétaire du lieu en 1837, à la mort de sa propre mère. Ce sera dès lors son refuge, soit pour écrire plus commodément, soit pour se remettre des déceptions de la vie parisienne. Le 8 mai 1845, l'Académie française signe enfin l'armistice avec Vigny en l'élisant à sa sixième tentative. Mais, en janvier 1846, son discours de réception trop long lui vaut une réplique quasi insultante du comte Molé. Fin 1846, Vigny toujours blessé part se réfugier en Charente. Après d'autres longs séjours, il y restera plus de trois ans consécutivement, de 1850 à 1853. Là aussi,