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Libération

Morrison, de l'eau dans le jazz.

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«Paradise», le dernier roman de la prix Nobel 1993, provoque une polémique aux Etats-Unis.
publié le 29 janvier 1998 à 17h13
(mis à jour le 29 janvier 1998 à 17h13)

Il est rare qu'un romancier fasse la une du magazine Time, ou soit invité par la prestigieuse émission télévisée 60 Minutes sur CBS. Encore plus rare qu'on puisse trouver sur les présentoirs d'aéroports un livre auquel le New York Times a consacré pas moins de trois critiques successives. Et il est exceptionnel qu'un éditeur décide de tirer un ouvrage à 400 000 exemplaires. Mais Paradise (paru chez Knopf), septième roman de Toni Morrison, est un «livre-événement». Depuis qu'elle a reçu le prix Nobel en 1993, la plus célèbre des écrivains noirs occupe une position unique sur la scène littéraire américaine. Jamais depuis Hemingway «un auteur de langue anglaise n'a décroché le Nobel tout en restant aussi fermement ancré dans la culture populaire», note David Streitfeld dans le Washington Post. Plus qu'au Nobel il est vrai, Morrison doit son énorme popularité à Oprah Winfrey, la reine noire du talk-show télévisé, qui a choisi l'an dernier Le Chant de Salomon, un roman datant de 1977, dans son «club de lectures». Elle a provoqué la vente d'un million d'exemplaires de ce titre en poche, et une hausse de 25% de la vente des six autres romans de Morrison, de L'oeil le plus bleu (1970) à Jazz (1992). Oprah va apporter à Morrison la consécration d'Hollywood à la fin de l'année, en produisant (et en jouant un rôle) dans le film que Jonathan Demme tourne d'après Beloved (1976). A 66 ans, Toni Morrison est donc à son apogée. «Nul autre écrivain contemporain a une autorité morale compar