Pendant longtemps, James Graham Ballard a paru se désintéresser de
la réalité quotidienne du monde dans lequel cet excentrique vivait à peine, perdu dans ses propres fantasmes se mesurant au ballet furieux de la technologie et de l'Histoire. Crash (1973), plus qu'aucun autre des livres expérimentaux où la SF se teinte de Nouveau Roman, nous fait pénétrer au coeur d'un univers sans pareil mais auquel n'accédera jamais qu'un groupe limité de lecteurs... Puis, subitement, sa propre histoire submerge Ballard qui écrit Empire du soleil, compte rendu méticuleux et nostalgique de son enfance déchirée à Shanghai durant la guerre et qu'un film de Spielberg a popularisé. Devenu du jour au lendemain best-seller international, le maître de la «spéculation fiction» anglaise n'abandonne pas sa façon très personnelle d'appréhender le monde et les hommes depuis sa tour d'ivoire, une modeste maison de Shepperton, dans la banlieue de Londres, où s'amoncellent livres, revues de photographie et bouteilles de whisky vides. Ces derniers temps, l'écrivain a décidé d'exercer sa lucidité en des terres plus rapprochées. Ainsi, dans le Massacre de Pangbourne ou la Course au paradis, il explore l'enfer des cités nouvelles, puis l'hystérie écologique.
Avec la Face cachée du soleil, Ballard s'en prend avec une férocité peu commune à un nouvel aspect de notre civilisation essoufflée. Estralla de Mar est une enclave touristique anglaise proche de Marbella, une sorte de paradis imaginé par des promoteurs à l'