Actuellement professeur à l'Institut for Advanced Study de Princeton (USA), Joan W. Scott est assez représentative de ces historiennes qui sont allées de l'histoire ouvrière (sa thèse portait sur les verriers de Carmaux à la fin du XIXe siècle) à celle des femmes, puis à l'histoire du genre, défini comme «l'organisation sociale de la différence sexuelle», dont elle est une des principales théoriciennes (1). En prenant le féminisme français du XIXe siècle comme objet, elle relève un double défi: montrer son existence et sa portée politique, la plupart du temps sous-estimées, au bénéfice d'un «mouvement de femmes» anglo-américain réputé autrement vigoureux, . Elle en souligne les contradictions récurrentes, structurelles, qu'Olympe de Gouges avait bien perçues, elle qui se présente «comme une femme qui n'a que des paradoxes à offrir, et non des problèmes faciles à résoudre», figure emblématique de la citoyenne paradoxale. Ces paradoxes, quels sont-ils? Le féminisme affirme et récuse à la fois la différence des sexes. Il l'affirme parce qu'il revendique au nom d'un «nous, les femmes», qui fonde la conscience de genre, en l'enracinant dans des qualités et des fonctions «naturelles», dont la maternité est une des clefs. Olympe parle au nom du «sexe supérieur en beauté comme en courage, dans les souffrances maternelles», cet équivalent du champ de bataille viril. Jeanne Deroin en 1848 s'appuie sur cette glorieuse différence pour réclamer le droit de vote. Hubertine Auclert avance
Critique
La cité des femmes
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par Michelle PERROT
publié le 12 mars 1998 à 22h45
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