Chico Buarque a 54 ans et les yeux particulièrement bleus. Il habite à Rio, près du Jardin botanique, un appartement calme avec vue sur le Pain de sucre, le Christ du Corcovado et le lac. Des tableaux s’exposent sur un canapé. C’est qu’une «catastrophe» s’est produite la veille, les pluies diluviennes ayant transpercé le plafond. Célèbre comme chanteur depuis plus de trente ans (l’école de samba de Mangueira lui a rendu hommage durant le carnaval de 1998), Chico Buarque a publié deux romans: Embrouille et Court-circuit, traduits chez Gallimard, le premier en 1992 et le second l’automne dernier. L’ambiance y est lourde, riche cependant d’«humour un peu noir», différente de celle sa musique. Le héros de Court-circuit, devant le peloton d’exécution, tâche de relier tout ce qui l’a mené là. C’est une histoire d’amour, certes, mais c’est aussi toute l’organisation d’une société où il est difficile de tenir tous les fils en main.
Chico Buarque a lu le livre de Caetano Veloso, Verdade tropical. Les deux hommes sont proches depuis trente ans, même si, comme le raconte Caetano, ils se sont séparés quelques mois durant dans la période de l’éclosion du tropicalisme ou du coup d’Etat de 1968 (qui a surenchéri sur celui de 1964). «J’ai aimé ce livre, même s’il y a beaucoup de choses avec lesquelles je ne suis pas d’accord, mais je comprends le point de vue de Caetano. Je n’envisage pas d’écrire un texte biographique. Ecrire, pour moi, c’est être en proie à l