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Libération

Une nation sur le divan

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A Rio, on s'allonge chez les lacaniens. A São Paulo, on est blindé. Ailleurs, on refoule les Indiens. Un philosophe, un psychiatre et un analyste auscultent le pays du foot et du carnaval: sous les plages, le Prozac?
publié le 19 mars 1998 à 20h54
(mis à jour le 19 mars 1998 à 20h54)

Chaïm Katz a fondé en 1993 la Formation freudienne «hors du lacanisme, précise-t-il, ce qui est rare au Brésil». Pourquoi Lacan a-t-il ainsi investi le divan et l'Université au détriment des autres obédiences, c'est que se propose de nous expliquer ce dissident. L'histoire de la psychanalyse commence ici avec l'IPA (International Psychoanalytical Association) fondée par Freud en 1910. Mais «s'étant accommodée de la dictature, l'IPA était considérée comme conservatrice et réactionnaire». On découvrit même en 1973 son implication dans la dictature et la torture (1). Ce discrédit ouvrit la porte au lacanisme. Selon Chaïm, si ce dernier a ensuite fait fortune, c'est d'abord parce que ne se mêlant pas de politique, il a pu progresser dans «une société qui n'a pas besoin de scandale» et donc entrer «dans beaucoup d'universités où il est aujourd'hui le seul dogme admis». Ensuite, «des scissions sont nées à cause du pouvoir et de l'argent, et chaque chef d'école ­ comme Miller qui marche très fort ici ­ a enrégimenté beaucoup de gens». A 61 ans, Chaïm Katz veut, lui, penser politique et psychanalyse ensemble. Il a bien connut Foucault qui, comme Deleuze, sert ici d'outil alternatif pour théoriser la réalité brésilienne.

Parmi les deleuziens, Laymert Garcia remarque dans son pays une étrange schizophrénie qui conjugue le modernisme le plus pointu à l'archaïsme le plus résistant: «Pour saisir ce qu'est le Brésil, rien n'est plus exemplaire que les photomaton.» En effet, au Brésil, ça