La philosophie occidentale a toujours valorisé les idées, entendues
comme les supports mêmes de l'expérience de la vérité. François Jullien, dans Un sage est sans idée, compare cette manie philosophique avec la tradition chinoise. Il semble que notre quête obstinée d'un sens, d'une vérité tapie sous chaque idée, laisse place au contraire à une tout autre intelligence des choses, que nous n'avons peut-être pas encore pleinement établie.
La marque séculaire du confucianisme sur la pensée chinoise a déjà été souvent soulignée. Le taoïsme a également séduit les esprits occidentaux. Les grands textes de référence de cette culture chinoise ne sont cependant pas si nombreux, que l'on n'ait pas pu en tirer les leçons. Celles-ci enseignent que la «Voie» (le Tao) consiste à mesurer les faits et la vie en fonction d'une harmonie entre les deux principes fondamentaux du yin et du yang. La sagesse chinoise appelle à se fondre dans l'ordre des choses. Il n'y a nulle transcendance donc pas de mystique ; nulle opacité donc pas de mystères; nulle individualité objective donc pas de culte de la personne" Les Chinois furent de grands stratèges, et doués d'un remarquable esprit pratique: c'est à peu près tout ce que l'Occident va admirer de leur culture intellectuelle. François Jullien rappelle que Hegel «débute par la philosophie des Chinois, mais "pour n'en plus parler par la suite». Merleau-Ponty va dans le même sens, de façon plus explicite: selon lui la pensée de l'«Orient» est rest