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Libération
Critique

Un Chomsky à réviser . Mal traduit, hagiographique, l'ouvrage de Robert Barsky en apprend beaucoup moins sur le père de la grammaire générative que le documentaire réalisé par deux Canadiens en 1992. Robert Barsky. Noam Chomsky, une voix discordante, traduit de l'anglais (Canada) par Geneviève Joublin, éditions Odile Jacob, 296 pp., 145F.

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publié le 26 mars 1998 à 21h29

Le cinéma peut être supérieur à la littérature. Prenez par exemple

le documentaire réalisé en 1992 par les Canadiens de Marc Achbar et Peter Wintonick sur Chomsky, «Chomsky, les médias et les illusions nécessaires» et bien il est bien meilleur que la biographie du linguiste qui vient d'être publiée. Que nous montrait le film? Un universitaire américain brillant, linguiste réputé, inventeur de la grammaire générative, vétéran des luttes contre la guerre du Viêtnam, qui continuait avec une belle vigueur et une grande lucidité à critiquer la politique de son pays, tant à l'extérieur qu'à l'intérieur. Un intellectuel juif qui s'en prenait à la politique d'Israël, un anticonformiste élevé dans les langues hébraïque et anglaise qui n'acceptait aucune des vérités bonnes à dire. Avec une clarté bienvenue, ce film mettait à mal la légende d'un Chomsky pol-potiste et cryptostalinien, colportée après qu'il a opposé aux dizaines de reportages sur la découverte des charniers au Cambodge, le silence des médias américains et occidentaux sur un autre génocide, cette fois-ci perpétré à Timor-Oriental par l'Indonésie, alliée des Etats-Unis (et avec l'accord de ceux- ci). A bonne distance, le film d'Achbar et Wintonick détaillait aussi l'intervention de Chomsky dans l'affaire Faurisson. Il montrait bien comment le linguiste, qui se dit libertaire, avait pris la défense de la liberté d'expression du négationniste français. Et comment il s'était fait manipuler par ses «amis» de la Vieille Tau