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Libération
Critique

C'était pas Louis. La «mélancolie» d'Althusser par Gérard Pommier. Gérard Pommier, Louis du néant, La mélancolie d'Althusser. Aubier-«Psychanalyse», 382 pp., 140 F.

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publié le 2 avril 1998 à 23h59

On se souvient que Freud s'était emparé du récit singulier d'un

contemporain, Les Mémoires d'un névropathe, de Schreber, et que sa lecture devint une référence dans la définition psychanalytique de la paranoïa. Dans Louis du néant, Gérard Pommier tente explicitement de se livrer à un exercice analogue, en prenant pour matériau les textes autobiographiques de Louis Althusser (Les faits et L'avenir dure longtemps). Comme le Président Schreber, Althusser cherche une explication que les psychiatres ne semblent pas avoir été en mesure de fournir, mais ne prétend pas s'engager pour autant dans une auto-analyse. Les documents qu'il a publiés appelaient donc sans doute à être interprétés par une personne du métier. Gérard Pommier recourt également aux autres sources - notamment les travaux biographiques de Yann Moulier-Boutang.

Gérard Pommier répète donc pour l'essentiel ce qui est déjà établi: une mère envahissante, un père lointain, une soeur qui restera fidèlement proche, une adolescence timide et studieuse, une conduite «angélique» et une sexualité tardive, un amour déchiré avec une femme qui a dix ans de plus que lui... Les explications majeures avaient été suggérées par Althusser lui-même, puis formulées par Yann Moulier-Boutang: Althusser fut hanté par une angoisse de castration, et se sentit menacé jusque dans la constitution de «son intégrité physique et psychique». Après le meurtre de sa femme, Althusser écrira: «je voulais à tout prix me détruire parce que depuis toujours,