Le domicile de Jacques Lacan, 5 rue de Lille à Paris, était aussi le cabinet de consultation du psychanalyste. Dans les années 70, le lieu était quotidiennement pris d’assaut, et la porte cochère devait tourner sur ses gonds comme un tourniquet. Dans l’attente de son tour, on se rendait au bistro voisin, qui faisait ainsi fonction de succursale de la salle d’attente du maître - et de lieu de nouvelles rencontres. Les anecdotes fusaient de bouche à oreille, se peaufinaient, fonctionnaient en quelque sorte comme un rébus de « sous-analyse: tout un chacun avait le loisir de s’en nourrir un peu, picorant ici un accent, là un geste, une formule, un concept... où s’entendait à coup sûr la « voix de son maître - de leur maître à tous.
Jean Allouch, psychanalyste formé à l'école lacanienne, s'amusa de cette situation qui avait des airs de Clochemerle des névroses, et de confessional du "Verbe estampillé à la sauvage. Florilège de cancans, un recueil de 132 bons mots avec Jacques Lacan parut sous sa signature en 1984, fit scandale... et mérita ainsi une réédition plus étoffée en 1992. Cette dernière fait place aujourd'hui à une version de nouveau enrichie: -Allô Lacan? -Certainement pas, qui compte 321 «bons mots» d'un acabit variable. Parfois l'analyste laisse en effet simplement parler l'esprit de répartie le plus universel: «Sur le ton d'agacement qui est habituellement celui de ce genre d'affirmation, l'analysant déclare: -Oh là là, ce que je suis bête. Lacan: -Ce n'est pas parce