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Libération

Face aux piles. De quoi parle-t-on?Mazarine Pingeot, Premier Roman, Julliard, 268pp., 129F.

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publié le 9 avril 1998 à 0h40

Et maintenant qu'inéluctablement s'apaise le tapage relatif à ce

pathétique Premier Roman, parlons-en. Non pas tant de l'ouvrage (1), mais de l'indignité qui inspira le coup éditorial à quoi évidemment il se résume.

A l'origine, il y a une jeune femme et encore enfant qui exprime le désir d'écrire un roman. A 20 ans révolus, ça la prend comme une envie de pisser: elle a «choisi» (et ce choisi est délicieux) de devenir écrivain, écrivaine, comme on voudra, mais là, maintenant, tout de suite. Las! La jeune femme souffre de ce handicap rédhibitoire d'être fille morganatique de feu François Mitterrand; de n'être même, pour «les médias qui la harcèlent», que ce gibier de magazine. Pauvre Mazarine! Sans doute eût-on pu attendre d'elle que, afin de se convaincre que c'est bien à sa qualité littéraire qu'elle devrait un succès de librairie encore hypothétique, elle optât pour une certaine discrétion, conforme à l'idée qu'une jeune fille bien née, normalienne et philosophe de surcroît, peut se faire, par ces temps impitoyablement marchands, de la littérature. Un pseudonyme, par exemple, et l'envoi par la poste de son tapuscrit, comme font chaque année des milliers d'aspirants... La méthode ne garantit pas un premier tirage à cinquante mille exemplaires, mais au moins préserve-t-elle ce qu'on appellera pudiquement une dignité, une morale... Oui mais non, car pour la jeune fille, ça presse.

Ça presse tellement qu'elle vendra son texte avant de l'avoir écrit. Ça tombe bien: il y a, dans sa