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Libération
Critique

Tobie or not Tobie

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Inspiré d’un récit biblique replacé au coeur du Marais poitevin, un roman fantastique et réaliste de Sylvie Germain.
publié le 30 avril 1998 à 23h56

Il y a un orage au début du texte, qui balaye tout et donne à un conducteur fugitif «l’impression de rouler sur une terre tout à fait inconnue, irréelle presque», mais qu’il est obligé d’accepter puisque la pluie torrentielle ne lui demande pas son avis. Le lecteur ne sait pas encore qu’il est semblable à ce voyageur et qu’il adhérera sans réserve au cauchemar fantastique que la fée Sylvie Germain rend réel. Il y a une boule jaune sur la route, «comme si le soleil avait été précipité sur la terre», mais ce soleil est une roue de tricycle rouge, et un tout petit bonhomme de 4 ans pédale de toutes ses forces. Ce petit garçon, c’est Tobie, qui donne son nom au livre. Il recherche sa maman, «un mot magique, merveilleux, qui ne tardait jamais, chaque fois que Tobie le proférait, à prendre visage et corps, sourire et parfum, et à se répandre en tendresse et baisers». A présent, le mot ne fait plus rien apparaître. Le corps mort de sa mère, Anna, est assis sur le voltaire du salon et son père, Théodore, a dit que la jeune femme était partie «au diable». De plus, son corps est «acéphale», sans tête. Comment est-ce possible? Mais les cauchemars, qu’on puisse s’en réveiller ou non, ne demandent pas l’avis de ceux qui les subissent.

Ce n'est que le début du livre, dans le Marais poitevin peuplé d'oiseaux, et Sylvie Germain réussit à rendre tangible l'émotion de l'enfant et de son père. Elle relate l'histoire de Théodore et d'Anna, que vingt ans séparent sans que la différence d'âge ne