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A Pombo ouvert

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Il parle à toute vitesse en mélangeant trois langues et vit dans un désordre invraisembable; on vient de traduire deux de ses romans, «le Mètre de platine iridié» et «Du côté des femmes». Rencontre à Madrid avec Alvaro Pombo, qui se prétend un paresseux, un misérable et un cochon. Mais que beaucoup considèrent comme un des plus grands écrivains d'Espagne.
publié le 28 mai 1998 à 2h18

Madrid envoyé spécial

Il est impossible de faire une interview d'Alvaro Pombo. Les idées se bousculent chez l'écrivain espagnol né en 1939, de sorte qu'il parle tout le temps en changeant perpétuellement de sujet. En outre, il mélange par politesse français, anglais et espagnol, semant un certain désarroi chez ses auditeurs. L'éditeur d'Alvaro Pombo et son attaché de presse étaient là aussi pour servir d'interprètes, trois heures durant, mais, comme il continuait à parler pendant qu'on traduisait ce qu'il venait de dire, la déperdition était considérable.

Son appartement madrilène n'est pas banal non plus. L'expression «désordre indescriptible» s'applique parfaitement. Malgré sa forte corpulence, Alvaro Pombo ne cesse de le parcourir pour chercher un livre ou un papier. Il rit souvent, baisse ses paupières, rendant encore plus frappant son visage entouré d'une barbiche blanche. Il n'a pas le téléphone. S'il a besoin d'une table, il saisit une corbeille à papier sans se soucier qu'elle ne soit pas vide et la renverse pour poser ses documents dessus. Il a habité à Londres de 1966 à 1977 en faisant des ménages dans le quartier juif pour survivre et il a dû estimer que la phase «nettoyage» de son existence était définitivement achevée dès qu'il remit les pieds en Espagne. Sur une (vraie) table, il y a un buste à l'antique qu'il a affublé d'une paire de lunettes et d'un chapeau. Au mur, des masses de tableaux accrochés de travers, eu égard à leur «aspect maritime», beaucoup représe