Fidèle à son objet de prédilection (les élites intellectuelles et
culturelles de la fin du XIXe siècle) et à sa démarche, fortement inspirée par la sociologie de Pierre Bourdieu, Christophe Charle a réuni dans ce livre une dizaine d'articles, écrits à des moments et dans des circonstances différentes, mais reliés ici par une problématique commune: les mutations affectant à la fin du XIXe siècle l'espace culturel parisien et pesant de ce fait sur l'ensemble de la production de biens symboliques. Trois idées importantes se dégagent de l'ouvrage. D'abord l'immense pouvoir d'attraction que possède alors la capitale. L'essai de comparaison esquissé avec Berlin est à cet égard très éclairant. Même si cette domination est parfois en trompe l'oeil (effet de centralisme et de l'addition d'institutions) et souffre d'évidentes limites comme la faiblesse des investissements scientifiques, Paris attire bien davantage que Berlin, ce qui en fait un lieu de tensions extrêmes et donc d'audaces créatrices. Mais cette intensité culturelle est aussi à l'origine de la multiplication de ceux que Charle appelle les «hommes doubles», intermédiaires et médiateurs rendus nécessaires par la disproportion croissante entre l'offre culturelle et la capacité de réception du public. Règne d'une critique conquérante qui décide du sort social des oeuvres, mais qui précipite aussi par réaction les deux phénomènes majeurs de la vie culturelle de cette fin de siècle: la naissance des avant-gardes et celle des «i