«Il n'y a qu'un seul fait que je puisse attester avec assurance. Le
fait que je suis né. J'ai, d'ailleurs, un témoin auquel je tiens beaucoup. Ma soeur cadette, qui a six ans de moins que moi, se souvient de m'avoir vu à l'âge de deux ans jouer à la poupée, sans être né!» Ce qui est sûr aussi, c'est qu'il n'était pas beau: «J'avais une grande tête pointue, en forme de courge. Mes yeux étaient petits, sans éclat, à peine existants" J'étais en plus tout rouge, rouge comme le vin, comme la pudeur, comme l'innocence"» Et qu'il venait «d'une petite ville blanche où pissent les vaches, ville de petits Juifs accrochés à l'air». Mais il faut se méfier des enfants qui se savent poètes, qui dès huit ans écrivent «naturellement», comme ils mangent ou jouent à chat, et trouvent étrange «qu'il y ait des gens qui n'écrivent pas». Tissée en fil de rêve, la vraie vie risque de prendre des contours nuageux et de s'évaporer. Il y a bien une «petite ville blanche» en Moldavie. Elle s'appelle Iassy. Benjamin Schwartzfeld y a fondé la première école juive. Sa fille Adela, d'une famille d'éminents intellectuels son frère Elias a écrit une Histoire des juifs de Roumanie , s'y est mariée, avec Isaac Wechsler, un petit commerçant originaire de Hertza, bourgade du nord de la Moldavie. Il y a bien un petit garçon, le fils d'Isaac et d'Adela, qui écrit des poèmes. Il s'appelle Benjamin Wechsler et est né le 15 novembre 1898.
Mais qui est alors Barbu Fundoianu alias I.G. Ofir, Alex Vilara, Diomède,