Pékin, de notre correspondante.
Une polémique entoure encore aujourd'hui la mort de Lao She. Certains estiment qu'il a été assassiné.
Lao She s'est assurément suicidé. Mais il faut replacer ce geste dans son contexte politique. Comprendre que c'était l'acte d'un intellectuel engagé. Tout s'est joué dans les jours qui ont suivi le lancement de la Révolution culturelle. Il était très critique sur les Gardes rouges. Il se considérait comme le porte-parole des pauvres, n'avait pas compris que pour les extrémistes il apparaissait comme un intellectuel, un petit-bourgeois.
Le 23 août 1966, il a été intercepté à la sortie de l'hôpital où il effectuait un contrôle de santé et conduit au temple de Confucius. Des Gardes rouges étaient en train de brûler des costumes de l'Opéra de Pékin. Des milliers de gens assistaient à la scène. Lao She était le président de l'Association des artistes chinois. Les jeunes gens l'ont poursuivi dans un commissariat de police où ses collègues avaient tenté de le protéger, ont continué à le battre dans la nuit. Ma mère a été appelée pour le récupérer. Le soir, elle a pansé ses blessures. Le lendemain, mon père a déclaré qu'il retournait à l'Association des artistes, mais il a disparu.
Des promeneurs ont repêché son corps le lendemain au nord de Pékin, dans le «lac de la Paix», qui a aujourd'hui disparu. Il avait plié ses vêtements sur la berge, posé dessus sa canne et ses lunettes. Sur son cadavre, on a retrouvé des cartes de visite. Ce lac avait une grande