Menu
Libération
Critique

Bourdieu et le mâle absolu. Femmes, encore un effort...

Article réservé aux abonnés
On peut adhérer aux thèses de Bourdieu et s’étonner du peu de crédit qu’il accorde au pouvoir de changement des féministes.
publié le 27 août 1998 à 8h23

Pierre Bourdieu entre à son tour dans l’arène du genre, où le Collège de France, avec Georges Duby, Michel Foucault, Paul Veyne et Françoise Héritier, a, il est vrai, beaucoup donné. On s’en réjouira, les femmes surtout, qui ne revendiquent aucun «monopole» à cet égard, contrairement à ce qu’insinue l’auteur, lequel, s’il crédite le «mouvement féministe» en général d’un «immense travail critique», se méfie plutôt des féministes en particulier. La domination masculine ne lui est certes pas étrangère. Il l’avait rencontrée dès ses premiers travaux d’ethnologue sur la Kabylie, vers laquelle il revient, comme vers l’archétype d’une culture méditerranéenne matricielle dans laquelle s’enracine la plus ancienne pensée de la différence des sexes. La domination masculine s’y lit avec évidence. Elle constitue le principe d’une organisation matérielle et symbolique où la virilité exaltée s’oppose à la féminité cachée avec la beauté d’une épure.

Comment se perpétue la domination masculine? Comment les hommes et les femmes adhèrent-ils à ces identités sexuelles, plus tyranniques certes pour les femmes soumises à leur violence, mais contraignantes aussi pour les hommes, obligés de se conformer aux normes d'une virilité souvent dérisoire. Cette dernière interrogation, en plein essor aux Etats-Unis, encore balbutiante en France (1), nourrit ici d'intéressants développements. Pour comprendre ce phénomène, il faudrait aussi faire autrement l'histoire des femmes, non pas seulement décrire les c