De Christophe Donner, on savait peu de choses, maigrement
anecdotiques et à peine scandaleuses un oncle ex-arbitre de football international, une embrouille avec Paul Ricoeur, le culte qu'il voue à feu Hervé Guibert, et la fierté puérilement démagogique de n'être titulaire d'«aucun diplôme». Plus une grosse trentaine de titres pleins de «je», de «mon», de «ma» et de «mes» qui disent un goût appuyé pour l'autofiction, comme on dit par ces temps. Ayant de sa charrue marqué son territoire, le jeune (1) Christophe Donner se préoccupe en cette rentrée d'y atteler les boeufs de la théorie. Il le fait dans un ouvrage au titre ambitieux, Contre l'imagination, dont la première phrase (façon Manifeste du Parti communiste: «Un poison infeste la littérature: l'imagination») dit assez la vocation polémique.
Comme d'autres cultivent l'art pour l'art, Donner cultive, dans ce qu'il qualifie lui-même de «brouillon manifeste» et on ne saurait mieux dire , la baston pour la baston. Tenant que, en matière de littérature, tout ce qui n'est pas l'ego est haïssable et relève de menterie, faribole et coquetterie, il donne le sentiment non fini, en plaidant pro veritas, de plaider surtout pro domo: la littérature, selon Donner, ne saurait avoir d'autre finalité que de dire le réel («le grand mystère de soi») qui serait seul le vrai (Ah! Le Vrai"), étant posé que sa fonction est de nous offrir «un reflet de la vie». De viriles formules relatives à «la petite musique» réduisent le style à une diver