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Libération
Critique

Chair de poule. Un jeune homme dans l'aviculture, une femme aux amours tues: «les vrais gens» d'un premier roman de Philippe Hermann . Philippe Hermann, Technicien chair, Belfond, 192 pp., 98 F.

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publié le 10 septembre 1998 à 11h30

On lit les premiers romans avec une certaine candeur, un sentiment

de virginité refaite, on est même prêt à se faire croire qu'on les découvre, comme si personne n'avait peiné dessus, l'auteur, bien sûr, les employés des postes, et surtout l'éditeur qui a consenti parmi mille manuscrits (qu'on ne verra pas mais qu'on suppose pires) et contre une dizaine de ses collègues (leurs choix sont sur nos piles) à miser les quatre sous de ses actionnaires sur Philippe Hermann ou un autre. Philippe Hermann, donc, dont Belfond nous dit ceci: «Né à Arras en 1962. Ingénieur conseil dans l'agriculture pendant cinq ans, il a pu, grâce à cette expérience, connaître les éleveurs de volailles dont il s'est inspiré pour écrire son roman.» Bon, on se dit que Robbe-Grillet aussi est ingénieur agronome, qu'il a su soigner les bananes, et on a vu où ça mène. Il ne suffit pas de savoir de quoi on parle pour en parler bien, mais ça ne peut pas nuire. Philippe Hermann parle de la vie humaine en régime libéral et dans un département dont Pascal Lainé, dans la première phrase d'un livre qui reçut le prix Goncourt, disait qu'il a la forme d'une betterave, c'était un livre sur l'ennui, on ne peut pas dire qu'en vingt-quatre ans les choses se soient améliorées.

Johann est jeune, son passé est «encore tiède», il débarque d'un ailleurs triste dans ce Nord pas gai, mi-terrien mi-maritime («Une vapeur iodée repoussait parfois des masses d'air plus froid venues des terres, apportant avec elle des regrets impréc