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Libération
Critique

Moi, Lucheni, assassin de Sissi.Les cinglants écrits de prison de l'anarchiste qui tua l'impératrice d'Autriche et les poèmes un peu fades de sa victime mélancolique. Luigi Lucheni, Mémoires de l'assassin de Sissi. Edition établie et présentée par Santo Cappon, Le Cherche Midi, 236 pp., 98 F. Journal poétique de Sissi, Arte/Le Félin, 220 pp., 125 F.

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publié le 17 septembre 1998 à 9h51

Il y a cent ans, à Genève, l'anarchiste Luigi Lucheni assassinait à

l'aide d'un tiers-point, arme de la basse pègre et des ouvriers avinés, l'impératrice Elisabeth d'Autriche, dite Sissi. Le crime, on le sait, eut un immense retentissement, aux sources d'une mythologie flamboyante. Des deux acteurs du drame cependant, la postérité fut inégale. A l'un, la sollicitude et les honneurs d'une légende dorée (1); à l'autre, la part maudite et «la vie des hommes infâmes». Un fil seulement reliait après leur mort l'assassin et sa victime: l'un et l'autre étaient auteurs d'écrits intimes, mais disparus et donc restés inédits. Signés Titania, les confessions poétiques de l'impératrice, bouclées après la mort de son fils en 1890, avaient été confiées à divers «dépositaires» pour être ouverts en Suisse en 1950, et publiées au bénéfice des condamnées politiques. Mais une partie des textes fut perdue, l'autre embarrassa, et ne parut finalement à Vienne qu'en 1984, à Paris aujourd'hui. Quant aux mémoires de Lucheni, rédigés dans la prison genevoise de l'Evêché entre 1907 et 1909, ils disparurent d'emblée, sans doute volés par un gardien. Retrouvés en 1938 par un collectionneur de vieux papiers, ils ne furent tirés de l'oubli que beaucoup plus tard, et sont aujourd'hui publiés pour la première fois.

Là, cependant, s'arrête l'analogie, car les deux textes procèdent de logiques opposées. Les poèmes de Sissi, dont le volume qui paraît aujourd'hui n'offre d'ailleurs qu'une petite sélection, tradu