Menu
Libération
Critique

De Luca en cordée

Article réservé aux abonnés
Un recueil des chroniques de l'Italien ex-gauchiste et toujours alpiniste pour un journal catholique.
publié le 24 septembre 1998 à 10h23

Depuis de longues années, Erri De Luca remplit des cahiers de phrases «pêchées un peu partout», au hasard de ses lectures. Ces citations constituent la matière première d'une chronique publiée chaque jour par le quotidien catholique italien Avvenire: une centaine d'entre elles ont été regroupées en volume sous le titre qui était déjà celui choisi par le journal, Alzaia. «Alzaia», en italien, c'est la cordelle, ce cordage qui sert à haler les lents bateaux sur les rivières et les canaux: Erri De Luca cherchait le nom d'une corde, du fait de la mise en page de l'article, étroit et long sous le titre, à la une d'Avvenire. Kafka et Rilke, Montaigne et Nietzsche, mythes grecs et Ancien Testament, mais aussi coupures de journaux et graffitis, chansons et paroles: puisant tous azimuts dans ses cahiers de citations, Erri De Luca y a déniché «avec une habileté de brocanteur» la phrase, «l'accident, l'idée», à quoi il a ajouté des choses qu'il avait vécues.

Ces articles sont, aux dires de l'auteur, ce qu'il a «su faire de mieux». C'est beaucoup de modestie au regard de l'oeuvre connue en français de ce Napolitain né en 1950, une huitaine de livres minimalistes mais ardents comme autant d'éruptions intérieures, marqués à la fois par son expérience d'ex-gauchiste établi en usine et aujourd'hui encore ouvrier et sa lecture approfondie de la Bible (1). Méditation intransigeante sur la vie quotidienne, sans rapport avec l'actualité journalistique du moment, Alzaia comporte des thèmes récurr