Isabelle Rossignol, la trentaine, a écrit des milliers de pages
avant de parvenir à la rédaction de ce très court récit, Petites Morts. Elle a noirci des milliers de pages en tous genres, journaux intimes, roman à personnages multiples, lettres, mais ce qu'elle voulait écrire n'y était pas. C'est en s'intéressant à autre chose en l'occurrence aux microbes qui l'avaient rendue tuberculeuse, enfant que Petites Morts est venu, très rapidement, sans trop de ratures. Ce que relate Isabelle Rossignol, et le mode qu'elle emploie pour le dire, est rare: comment une jeune fille découvre qu'elle ne peut pas faire l'amour. Sans aucun exhibitionnisme, ni que la question de l'autofiction soit en jeu. La jeune fille qui s'exprime à la première personne n'est pas décrite. Elle n'est pas un personnage auquel le lecteur peut donner corps, mais il entend ce qu'elle entend, éprouve ce qu'elle touche. Impressions volées à l'enfance: «Mon oncle a les yeux rouges et les joues écarlates. Il est gros. Ses mains sont des tranches de viande; sa barbe, une raison de ne pas l'embrasser" Parfois les tranches de viande s'agitent. Elles font des gestes, font des mimes et les autres hommes s'esclaffent. Je voudrais que mes tantes pleurent. Ou bien qu'elles se lèvent et quittent la salle, mais si elles se lèvent, les tranches de viande courront jusqu'à leurs fesses. Tranches qui palpent, fesses qui se rétractent et tantes qui diront: "Oh! Arrête don'voir!»
Quel rapport avec les microbes? Isabelle Rossign