Il a volé des poires. Il ne s'en est pas même délecté. Il les a
jetées aux porcs. Et n'a joui, le misérable, que d'avoir pratiqué un acte interdit «pour la seule raison qu'il était interdit». Aussi, lorsqu'il s'adresse au Très-Haut, qui a tout vu, n'est-il pas bien fier de son «crime nocturne»: «O pourriture! O vie monstrueuse! O abîme de mort!» Bat-il trop fort sa coulpe? C'est qu'il en a fait d'autres, de bêtises, peccadilles, chahuts et rixes. Qu'il n'a guère résisté aux tentations de la chair. Qu'il a dragué dans les églises. Qu'il a même fait un enfant à une femme dont il n'était pas l'époux. Et qu'au moment où il les confesse, toutes ces «fautes et actions sacrilèges», il est évêque. Un acte de contrition eût suffi pour les effacer: Augustin écrira les Confessions, l'un des plus beaux textes de toute l'histoire de la philosophie, où s'invente l'«autobiographie», l'examen de conscience, sinon la notion même d'«intériorité».
saint Augustin entre dans la «Bibliothèque de La Pléiade». Le volume I des oeuvres, publié aujourd'hui, contient, outre les Confessions, ses premiers «dialogues» dont l'importance tient à ce qu'Augustin les a écrits à une époque cruciale de sa vie, entre 386 et 391, à l'heure où il a cessé d'être un professeur de rhétorique un «marchands de mots» , mais n'est encore ni le «pasteur des âmes» ni le grand théologien, et où il «devient» philosophe.
En 387, Augustin reçoit le baptême des mains de saint Ambroise. Il a 33 ans. Sa mission est alors claire: