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Libération
Critique

La nuit du chasseur. La geste du dictateur Koyaga, son règne sanglant, ses fastes et ses crimes: un portrait apocalyptique de l'Afrique postcoloniale, par Ahmadou Kourouma. Ahmadou Kourouma. En attendant le vote des bêtes sauvages. Seuil, 360 pp., 130 F.

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publié le 15 octobre 1998 à 14h04

Le président Koyaga règne depuis trente ans d'une main de fer sur la

république africaine du Golfe, mais voilà que les choses se dérèglent. Obligé de céder au FMI pour tenter de sortir son pays de la crise où il l'a plongé, le dictateur voit son pouvoir absolu défié par les jeunes désoeuvrés et tous les laissés-pour-compte. Lui qui, en chasseur impeccable doué de capacités surnaturelles, a triomphé l'un après l'autre de tous les complots ourdis par ses amis et ses parents les plus proches, reste impuissant face à cette révolte. Il pense gagner à l'usure et par la ruse, mais est-ce si sûr? Sera-t-il réélu sans l'aide de sa mère et de son sorcier numéro un, qui ont disparu? Lui faudra-t-il, pour continuer son existence de despote, compter sur le vote des animaux de la brousse? Ne lui reste-t-il qu'à être, et pas seulement métaphoriquement, le président des bêtes sauvages?

Ahmadou Kourouma, qui signe, avec En attendant le vote des bêtes sauvages, son troisième roman en vingt ans, est né en Côte-d'Ivoire il y a soixante et un ans. Au début des années 60, il a été accusé par le président Houphouët-Boigny d'avoir trempé dans un soi-disant complot contre lui. Emprisonné, Ahmadou Kourouma a été relâché, essentiellement, pense-t-il, parce qu'il était marié à une Française. Cette mésaventure est à l'origine de son premier roman, écrit «par nécessité» et paru en 1976, les Soleils des indépendances, un classique aujourd'hui enseigné dans les écoles du continent. Actuaire de formation, f