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Critique

La clef de Searle. Sur le cadre de l'univers mental et des sciences physiques, le philosophe américain reconstruit le tissu de la «réalité sociale». John R. Searle, La Construction de la réalité sociale, Traduit de l'américain par Claudine Tiercelin, Gallimard, 306 pp., 150 F.

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publié le 29 octobre 1998 à 12h49

Professeur de «philosophie de l'esprit et du langage» à l'université

de Berkeley en Californie, John Searle est une figure singulière dans le paysage intellectuel américain. Tout en appartenant au courant, dominant aux Etats-Unis, de la«pensée analytique», son oeuvre semble toujours en rébellion contre l'idée que la philosophie puisse se réduire à une science de l'«esprit» humain, dont le fonctionnement obéirait aux règles logiques (ou lois) du «langage». Dans un ouvrage précédent (1), John Searle avait tenté de définir les «relations qui existent entre nous en tant qu'êtres humains conscients et le reste de l'univers physique». Il définissait alors la philosophie analytique comme une connaissance de cette «réalité non physique» que l'on désigne communément par la «conscience». Il adopte une démarche analogue dans la Construction de la réalité sociale, mais en distinguant cette fois deux ordres de «réalité non physique», dont il définit les relations. Face à «l'univers mental», il propose une ontologie et une épistémologie de l'ensemble des «faits institutionnels».

Ces derniers représentent une réalité non physique ­ la «réalité sociale» ­ fabriquée par l'homme et admise par lui comme un monde objectif, indépendant de lui. Cet ensemble est vaste, et nous y baignons presque autant que nous baignons dans l'univers physique: il englobe aussi bien l'argent, les mariages, les gouvernements, les élections, les matchs de football, les soirées mondaines" La «réalité sociale» jouit d'