C'est l'arrestation d'André Mandouze en novembre 1956 qui marque
définitivement «l'entrée dans l'action» de Pierre Vidal-Naquet. Depuis l'année précédente, les événements d'Algérie révoltent de plus en plus ce jeune agrégé d'histoire professeur au lycée d'Orléans, lecteur d'Esprit et de France-Observateur, et notamment l'usage de plus en plus systématique, par un gouvernement socialiste, de la torture contre les rebelles. Aussi l'emprisonnement de Mandouze, de quinze ans son aîné, animateur à Alger avec François Châtelet d'une revue, justement appelée Consciences maghrébines, qui a vu venir depuis longtemps l'explosion algérienne, va-t-il être le déclic: Pierre Vidal-Naquet, dont le père a été torturé par la Gestapo avant de mourir avec sa femme, juive comme lui, à Auschwitz, passera le plus clair de son temps à lutter contre la sale guerre. Il s'occupe notamment du Comité Maurice Audin, du nom d'un enseignant français disparu en Algérie et dont la mort ne sera officiellement reconnue qu'en 1963. En 1958, Pierre Vidal-Naquet publie aux éditions de Minuit le dossier complet de l'Affaire Audin, à l'heure où paraît chez le même éditeur un livre retentissant: la Question, témoignage d'un ancien torturé, Henri Alleg.
La guerre d'Algérie occupe ainsi le premier tiers du second volume des mémoires de Pierre Vidal-Naquet (1). Assistant à l'université de Caen, puis à celle de Lille, l'auteur est provisoirement suspendu d'enseignement après avoir signé en 1960 le fameux «Manifeste des 1