Menu
Libération
Interview

Les tribulations d'un Chinois en Cheng.Passeur en France de la culture chinoise et en Chine de la poésie française, François Cheng narre, dans «le Dit de Tianyi», l'itinéraire d'une génération de Chinois qui s'achève dans le chaos de la Révolution culturelle. Entretien. François Cheng , Le Dit de Tianyi, Albin Michel, 413 pp.,130 F.

Article réservé aux abonnés
publié le 5 novembre 1998 à 15h50

Chinois de naissance, Français d'adoption, François Cheng pour-suit

depuis des décennies son travail, souvent solitaire et douloureux, d'érudit et de passeur entre deux mondes, poète traduisant en chinois la quintessence de la poésie française ou esthète initiant le public français à la profonde subtilité de la peinture chinoise. A l'aube de sa soixante-dixième année, il publie simultanément son premier roman, le Dit de Tianyi, vaste fresque tourmentée de la Chine contemporaine à travers le destin de trois êtres liés jusque dans la mort, une étude sur un des plus grands peintres chinois de l'âge classique, Shitao (lire ci-dessous), et enfin un recueil de poèmes, Double Chant, bilingue et calligraphié par ses soins dans une belle édition bibliophilique (1).

Tianyi est un Chinois né en 1925, fils d'instituteur. Après une jeunesse nomade et des études aux Beaux-Arts, il s'embarque pour la France en 1948. Au pays, il laisse «l'Ami», le poète Haolang engagé parmi les combattants communistes, et «l'Amante», Yumei, aimée depuis l'adolescence, devenue actrice, mais qui lui a finalement préféré «l'Ami». En 1957, il décide de rentrer en Chine: l'Ami a disparu dans une purge et l'Amante l'a appelé à l'aide. Sur place, il apprend que Yumei s'est suicidée et que Haolang survit dans un camp de travail, dans l'extrême nord du pays. Le roman s'achève à l'automne 1968, en pleine Révolution culturelle: Tianyi a rejoint Haolang dans un camp, ils sont les têtes de Turc des gardes Rouges, et «la f