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Libération

Face aux piles. Polémistes prudents.Thierry Pfister, Lettre ouverte aux gardiens du mensonge, Albin Michel, 190 pp., 85 F Jacques Vergès, J'ai plus de souvenirs que si j'avais mille ans, La Table ronde, 236 pp., 105 F.

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publié le 19 novembre 1998 à 14h36

A propos de la vie des prétoires, deux livres comme deux pions trop

timides sur l'échiquier de la chronique judiciaire; battant des pages dans la promesse d'un envol ambitieux, ils laissent tous deux un sentiment d'inachevé, dont on se demande s'il faut le mettre au compte d'un excès de prudence embrouilleuse, pour celui de Vergès, ou d'un emballage inapproprié, pour celui de Pfister. Et c'est dommage.

Dans sa Lettre ouverte aux gardiens du mensonge, l'ancien journaliste du Monde et ex-conseiller à Matignon (sous Pierre Mauroy) s'élève contre le rétablissement de «l'antique censure», par le biais d'un acharnement procédurier invoquant systématiquement la protection de la vie privée; «elle a bon dos, la vie privée», fait valoir à bon droit Pfister, quand les plaignants ­ personnages notoirement publics ­ l'invoquent à tort et à travers, tel pour dissimuler ses turpitudes, tel pour s'assurer, par le biais de la fumeuse «biographie autorisée», le contrôle de son image, tel pour empocher l'«argent de poche judiciaire» de dommages et intérêts rapinés à des magazines que la mort de Diana vérola, mais à l'endroit desquels s'entretint longtemps la perverse indulgence du donnant donnant. Bien servi par une actualité qui met en évidence l'inflation des affaires (1), Pfister est convaincant lorsqu'il avance la thèse d'une instrumentalisation de l'appareil judiciaire, dont la complaisance à l'endroit du référé-diffamation met à mal les fondements mêmes de la démocratie. La thèse est bell