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Interview

Claude Seignolle: «Un ermite dans sa grotte»

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Auteur d'une pléiade de recueils de contes et légendes, Claude Seignolle fut le disciple et l'ami de Van Gennep. Entretien.
publié le 3 décembre 1998 à 18h27

L'écrivain Claude Seignolle est sans doute un des derniers à avoir

connu de près Arnold Van Gennep. Bien qu'il ait été son cadet de plus de trente ans, il a côtoyé le savant du début des années 30 jusqu'à sa mort, au point d'en devenir le collaborateur et l'ami. Aujourd'hui âgé de 81 ans, et lui-même à la tête d'une oeuvre imposante de folkloriste (on lui doit des anthologies de contes et légendes sur la plupart des régions françaises), Claude Seignolle se souvient de «ce vieil oncle à qui il doit tout».

Dans quelles circonstances avez-vous connu Arnold Van Gennep?

J'avais 13 ou 14 ans. Il habitait Bourg-la-Reine et moi Chatenay-Malabry. J'étais passionné d'archéologie et j'avais fait des fouilles avec mon frère. Nous avions trouvé des haches polies, des fragments de statuettes. C'est mon professeur d'histoire qui m'a envoyé vers lui, il savait qu'il avait fait des fouilles sur le plateau de Villejuif. Je suis arrivé chez lui avec un sac rempli de cailloux. Il est allé chercher un carton qui en contenait tout autant. Il a regardé mes trouvailles et m'a dit: «Nous faisons tout ça pour rien. Ce qu'il faut creuser, ce n'est pas la terre mais la mémoire populaire, la tête de tous ces paysans qui vont mourir en emportant tous les récits de la tradition.» Après quelques visites, il m'a demandé si mon frère et moi avions des vélos et nous a proposé de travailler pour lui. Il nous a vite convaincus et nous a préparé tout un questionnaire sur les fêtes, les rites, les guérisseurs, et