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Critique

Spécial Beaux Livres. C'est la faute à Rousseau.Le fac-similé du «Contrat social» annoté par un Voltaire vif ou rageur. Emouvant. Jean-Jacques Rousseau, Du contrat social, Edition originale commentée par Voltaire, Le Serpent à plumes, 290 F.

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publié le 10 décembre 1998 à 19h11

«Polisson. Il te sied bien de faire des prédictions.» On savait que

Voltaire et Rousseau ont passé leur vie à se disputer, en voici une preuve supplémentaire, apparemment anecdotique mais amusante et même émouvante: un exemplaire de l'édition originale du Contrat social (Amsterdam, 1762), annoté par Voltaire lui-même. Conservé à la Bibliothèque nationale de Russie à Saint-Pétersbourg, cet exemplaire fut récupéré à sa mort par l'impératrice Catherine II en même temps que la totalité de la bibliothèque de Voltaire. Il est aujourd'hui réédité en fac-similé dans un ouvrage de belle facture, avec les commentaires de Voltaire dans les marges. Des notations brèves, acerbes, ironiques, excédées. Voltaire défend le progrès et l'individu. Rousseau déteste les villes et croit en la vertu d'un corps social unifié. «On ne peut offenser un des membres sans attaquer le corps», écrit-il. Note de Voltaire: «Cela est pitoyable. Si on donne le fouet à Jean-Jacques Rousseau, donne-t-on le fouet à la république?» Rousseau: «Dans le fait, les lois sont toujours utiles à ceux qui possèdent et nuisibles à ceux qui n'ont rien"» Voltaire, rageur: «Au contraire, les lois protègent le pauvre contre le riche.» Les critiques ne sont pas toujours aussi argumentées et peuvent être aussi lapidaires qu'une copie corrigée: «Supposition ridicule», «tu n'es pas géomètre», «obscur et faux», «tout cela n'est pas exposé assez clairement», «quel sophisme», et autres compliments" «M. de Voltaire, le plus ardent et le