A un an et une paire de semaines de l'échéance à triple zéro, c'est
parti, et il ne fait pas de doute qu'il y en aura pour tout le monde, tant l'an 2000 et les fantasmes qu'il charrie dessinent déjà un marché, filon dont tout le monde, à commencer par ceux qui le promeuvent, s'accorde pourtant à admettre l'artificialité. Il constitue la raison d'être et le commun dénominateur des deux ouvrages publiés par les éditeurs Fayard et Albin Michel, qui tirent la première salve et affichent la plaisante ambiguïté de leur futile entreprise: selon tous les prolixes invités appelés à gloser sur le passage au troisième millénaire, il est patent que, comme l'énonce l'un d'entre eux sur le ton d'une idée reçue mais coquettement paradoxale, «le seul événement à venir en cette fin de siècle, c'est justement la fin du siècle». Ce rien fera du bruit. Alors, vendre ça ou autre chose" Pas gênés, nombre de nos «grands témoins», qu'ils en participent naïvement ou cyniquement l'entretiennent, évoqueront avec plus ou moins de conviction ce «mensonge médiatique», qu'ils nourriront dans les gazettes tout au long de l'année à venir. Appelons ça bouffer à tous les râteliers, et voyons un peu comment ça marche.
A priori, le produit Fayard vise à mettre le troisième millénaire à la portée de tout un chacun: dans la Fin des temps, trois journalistes (1) de l'Express et du Nouvel Observateur papotent avec ces figures passablement familières que sont le paléontologue Stephen Jay Gould, l'historien Jean Delume