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Libération
Critique

Amis à mi-vie

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Par Bruno Bayen, les vagabondages amicaux d'Osmer et Jean, voguant de Paris à Macao dans les flots de la cinquantaine rugissante.
publié le 31 décembre 1998 à 17h59

C'est l'histoire d'une amitié. Entre deux hommes, Osmer et Jean. Ni ados ni croûtons, du pur mûr. «La fin de la jeunesse sonna pour moi quand les impôts m'ont rattrapé, quand à la visite des zoos j'ai préféré aller dans les cimetières et quand je ne me suis plus dit: j'ai soif, comme je le disais jusqu'à trente et un ans», dit Osmer, marié à Suzanne, dont Jean, impitoyablement drôle et tendre, décrit ainsi le visage: «nourri aux corn flakes, au lait en poudre, aux yaourts bulgares vendus par seize, aux nourritures crissantes comme leur emballage, et revu par un peintre italien». Jean le célibataire, voyageur par inadvertance perçut, lui, la fin de sa jeunesse à «un signal plus ténu», raconte Osmer, un samedi matin-taxi comateux lorsque la radio cracha «le pape est mort», comme elle l'avait déjà fait (autre matin-taxi) un mois auparavant.

Jean raconte Osmer, puis Osmer raconte Jean, ou inversement. «Vous n'avez ni l'un ni l'autre un visage de combattant», dit Suzanne, en les regardant. Nullement anciens combattants du souvenir (lequel est «toujours provincial», décrète Osmer), ils sont plutôt des Parisiens adeptes de la promenade et des retrouvailles non programmées. Le roman égrène jusqu'à Macao les semences de ces vagabondages dilettantes de la mi-vie, où Jean et Osmer ne s'échangent pas des vêtements (comme les filles) mais des romans, lesquels les énervent comme une chemise bien repassée à laquelle il manque un bouton.

Bruno Bayen est l'auteur de cette délicate comptine à d