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Libération
Critique

La marche de Rutkowski. Dans la vieille tradition des flâneurs parisiens, le Polonais Rutkowski arpente les rues et les livres. Krzysztof Rutkowski, Les Passages parisiens. Traduit du polonais par Frédérique Laurent. Exils, 182 pp., 95 F.

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publié le 31 décembre 1998 à 18h00

Dans ses «Chroniques d'un écrivain polonais», sous-titre d'un

recueil dont le titre est bien sûr un hommage à Walter Benjamin, Krzysztof Rutkowski, universitaire, 45 ans, vivant à Paris, est un vrai flâneur des deux rives. Il circule d'une époque à l'autre, des pantalons de la Pompadour aux yeux de Naomi Campbell, des libertins érudits à la morale esthétique de Jean-Noël Vuarnet. Il passe avec la même aisance du livre à la rue, arpente la littérature, déchiffre le pavé. «Epeler lentement et avec précaution»: la ville est un texte.

«Qui lisait la boue de Paris? Un éminent chimiste, qui avait inventé les bougies stéariques, doyen de la faculté de médecine de l'Académie: Eugène Chevreul. Le 7 mai 1830 Chevreul écrivit un rapport au préfet de Paris, demandant à ce dernier de publier l'autorisation d'aller au trot en ville.» Ayant lu le risque de choléra dans la boue de la rue Mouffetard, le savant préconisait que les voitures chargées de cadavres en putréfaction ne lambinent pas. Dans la même livraison (il s'agit de chroniques inspirées par une actualité parfois éditoriale, toujours personnelle, adressées ces dix dernières années au quotidien Gazeta Wyborcza), Rutkowski aborde le thème des cafés, en décompte 65 000 aujourd'hui dans le pays, contre 220 000 en 1960, et se plaint de tapage nocturne au commissaire «admirateur de Proust et de Genet», dont dépend le quartier du Marais où il habite.

Le Marais, les Halles sont devenus des repaires de barbares amateurs de techno, aux yeux