La grande trouvaille de G.J. Arnaud, à l'orée des années 50, est
d'avoir opportunément réhabilité l'atmosphère provinciale dans le roman policier français. Lorsqu'il publie, en 1952, son premier livre, Ne tirez pas sur l'inspecteur, que vient de couronner le jury du prix du Quai des Orfèvres, il n'a qu'une idée en tête: devenir romancier populaire, et ce n'est pas un hasard si ses dieux tutélaires sont Georges Simenon et Alphonse Daudet. A cette époque, les jeunes auteurs du genre sont entichés de Peter Cheyney et de James Hadley Chase, et suspendus aux lèvres des héros des films noirs américains. Contraint à signer ses livres du pseudonyme de Saint-Gilles en raison du succès que remporte un autre Georges Arnaud (le Salaire de la peur), le petit prof de Saône-et-Loire décide donc de gagner sa vie grâce à sa plume véloce. Il tire les sonnettes des éditeurs de l'époque, non pas la Série noire ou le Masque, mais d'obscures officines dont les affaires ne sont guère brillantes. Son prix lui ouvre cependant les portes des éditions de l'Arabesque, où va s'épanouir un talent diversifié. C'est qu'il entend bien, à l'instar d'auteurs comme Max-André Dazergues ou Jean de La Hire, les colosses d'alors du roman populaire, s'essayer à tous les genres en vogue. Il va donc fournir à ses commanditaires des romans de suspense psychologique, dans la veine exploitée par les Boileau-Narcejac et Frédéric Dard, et des récits d'espionnage, un genre en plein essor grâce à Jean Bruce et à deux cousins