Historienne, Michelle Perrot a dirigé avec Georges Duby les cinq volumes sur l’Histoire des femmes en Occident (Plon 1991-1992). Dernier livre paru: Les Femmes ou les silences de l’histoire, 1998 (Flammarion).
Comment fut accueilli «le Deuxième Sexe» à sa sortie, en 1949?
La sortie du livre fut spectaculaire et polémique. François Mauriac, qui s'indignait auprès des Temps Modernes d'avoir «tout appris sur le vagin de votre patronne», ouvrit le débat dans le Figaro littéraire. Les milieux catholiques furent en général scandalisés par l'analyse de Simone de Beauvoir sur la sexualité féminine. Pas tous, cependant: Esprit, avec Emmanuel Mounier ou Jean-Marie Domenach, se montrent nettement plus ouverts; tandis que les intellectuels communistes estiment le livre «réactionnaire». La frontière de l'indignation traverse les camps. Bref, ce fut un scandale.
En quoi ce livre pouvait-il choquer?
Simone de Beauvoir ose décrire, sans euphémisme, la sexualité des femmes. Elle parle du vagin, du clitoris, des règles, du plaisir féminin », ce qui, en ces années si prudes d’après guerre, demeure un tabou. L’information sexuelle est rudimentaire. Mona Ozouf raconte comment, lycéenne à Saint-Brieuc, désireuse d’en savoir plus sur la nuit de noces, elle interrogea sa grand-mère, bretonne: «Ma chérie, ne t’inquiète pas, c’est tout de suite fini.» (1)
Y a-t-il au moins un élan de solidarité du côté des femmes?
Pas vraiment. Du côté des associations de femmes, de toutes tendances,