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Critique

Bove, le banal flambé.Un inédit et un recueil de neuf romans de l'auteur de «Mes amis», né en 1868 et mort en 1945. Emmanuel Bove a écrit le réel avec une époustouflante banalité. Emmanuel Bove, Un caractère de femme, Flammarion, 166 pp., 90 F. Romans, Flammarion, «Mille & une pages», 1 016 pp., 158 F.

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publié le 18 février 1999 à 23h47

«Bove a inventé une façon de voir le réel. Il avait le génie de nous

montrer ce qui est évident mais que nous ne voyons pas parce que c'est évident. La plupart d'entre nous ne voient pas l'évidence du réel. Bove la voyait et la montrait», écrit Christian Dotremont, cofondateur du mouvement Cobra. C'est bien son singulier rapport à la réalité qui caractérise Emmanuel Bove, écrivain français né Emmanuel Bobovnikoff en 1898 et mort en 1945. Rainer Maria Rilke écrit pour sa part: «Dans ma jeunesse, on avait l'habitude de se faire faire des gants "sur mesure. Se faire tenir la main par le gantier était une sensation très particulière. En lisant le plus récent livre de Bove, j'ai eu le souvenir de cette sensation, jusqu'au sentiment physique des doigts exposés aux calculs du gantier.» Samuel Beckett recommanda Bove en ces termes: «Il a comme personne le sens du détail touchant.» Et Peter Handke, qui a traduit l'écrivain français en allemand, écrit à Jean-Luc Bitton, coauteur (avec Raymond Cousse, mort aujourd'hui, qui fut l'artisan de la redécouverte de Bove dans les années 70) de la biographie la Vie comme une ombre (Castor astral, 1994) à qui cette lettre sert de préface: «J'ai failli pleurer plusieurs fois (en lisant les citations de Bove qui sont toutes à la bonne place). (") Emmanuel Bove devrait devenir le patron-saint des écrivains (purs), plus que Kafka, et de la même façon que Anton Tchekhov et Francis Scott Fitzgerald.»

Fils d'un juif russe sans profession et d'une domest