On pense à Boston qu'elle est «trop mondaine pour être
intelligente», on craint à New York qu'elle soit «trop intelligente pour être mondaine». Tel est le pays dans lequel Edith Wharton est empêtrée jusqu'à ce que son mari neurasthénique et elle déménagent pour la France. Là, elle divorce en 1913, après avoir connu son premier amour fou à 47 ans. A Paris, elle sait apprécier, et perpétuer, l'esprit des salons.
Mrs. Wharton comme l'appelle Gide dans son journal se démène pendant la Grande Guerre. Elle se rend au front pour la Croix-Rouge afin d'évaluer les besoins des hôpitaux qui manquent de tout, organise un atelier de couture, centralise l'accueil des réfugiés. Elle ne se reconnaît pourtant pas l'âme d'une dame patronnesse à vaste échelle. Elle fait son devoir, parce qu'elle est femme à ça. Elle s'interrompt juste pour des vacances auprès de son ami Lyautey au Maroc, en revient avec un guide de voyage (traduit l'année dernière chez Gallimard), puis s'en retourne avec soulagement à ses romans.
Son effort de guerre comporte une série d'articles, rassemblés en 1919 sous le titre les Moeurs françaises et comment les comprendre, inédits chez nous comme Les dieux arrivent. Edith Wharton dépeint un peuple plein d'usages et de raison par opposition à la jeune nation de pionniers. La parité hommes-femmes est en gestation: «La qualité de la nourriture vient d'abord mais, une fois qu'elle est assurée, le principal souci de l'hôtesse est que la qualité de la conversation en soit dig