Plus la nature est sauvage et moins elle est naturelle, écrit Simon
Schama dans le Paysage et la mémoire, tant un simple coup d'oeil humain suffit à acculturer bois, eaux et montagnes inviolés. Aussi l'homme n'habite-t-il finalement que le langage, c'est-à-dire la production incessante d'oeuvres, représentations, mythes, bref de culture, qui, en se combinant avec la mémoire, métamorphose tout lieu en paysage. Du coup, les paysages que l'on croit les plus vierges peuvent se révéler, à la réflexion, de purs produits culturels. Mais, de cette foncière humanisation de la nature c'est l'argument de l'ouvrage , «il ne faut pas s'en affliger, se sentir coupable, mais au contraire s'en féliciter». Au lieu d'expliquer une fois de plus ce qu'on a perdu, Simon Schama propose donc d'explorer ce qui nous reste à trouver. Evidemment, la mémoire dont il est question ici a partie liée avec l'histoire culturelle de l'Occident, mais elle est comme greffée sur les souvenirs personnels de l'auteur. Il ne peut pas en être différemment: les paysages sont toujours autobiographiques, et leur lente traversée finit par tracer le portrait de Schama lui-même dans lequel un peu à la manière d'un Arcimboldo les forêts figureraient la peau, les rivières le sang et les montagnes les os.
Le voyage commence en Lituanie dans une double quête des origines, de Simon Schama lui-même et de la forêt primordiale. A la lisière de la Pologne actuelle et de cette république balte, il est retourné fouler ce qui r