Dès le début, Gianni Celati semble tenté par le silence. C'est pour cela peut-être qu'écrire chez lui relève de l'épuisement. Epuisement d'une manière et d'une matière, comme du souffle vital, qui à chaque fois fait craindre au lecteur qu'il en reste là. Et puis ça repart: la parole trouve d'autres voies, se fait à nouveau récit, annoncé, préparé, par une traduction ici, un essai là, un voyage ici et là. Attiré par la contemplation, l'écrivain y échappe en changeant de lieu, de vie, d'écriture. Qu'en est-il de Gianni Celati, se demande-t-on alors, où est-il? Après l'Italie où il est né en 1937, l'Allemagne, la France, les Etats-Unis ont été ses pays de longs séjours et, depuis sept ans, l'Angleterre.
Il y a deux périodes assez distinctes, correspondant chacune à une décennie, dans la production littéraire de Gianni Celati. La première couvre les années 70, et voit, après un petit livre préfacé par Italo Calvino, la parution, coup sur coup, de trois romans, qui composent une sorte de trilogie du nomadisme, dont les Aventures de Guizzardi, paru en 1972 (traduit chez Salvy en 1991) et l'Almanach du paradis, publié en 1978 et traduit aujourd'hui par Flammarion. Dans ce cycle où la grasse rigolade plébéienne se conjugue à un sentimentalisme aussi naïf qu'éthéré, digne du plus spirituel des chevaliers errants, le protagoniste avance entre fou rire et rire de fou, les deux béquilles sur lesquelles s'appuie cette douce marionnette lunaire, qui préfère se plaindre et moquer de lui-mêm