Jeudi 1er janvier: «L'année 1998, en Chine, sera l'année du Tigre.
Douceur, ciel gris-bleu, puis bleu.» Comme plusieurs de ses confrères avant lui, Philippe Sollers s'est prêté au jeu créé il y a quelques années par les éditions du Seuil: tenir son journal pendant un an, pour publication dès le début de l'année suivante. La manière en est peut-être moins spontanée qu'un journal écrit sans intention de publier, au moins dans l'immédiat, mais la commande aiguise les sens: «Il s'agit de vivre, pendant douze mois, avec une attention romanesque redoublée. Glissements, informations, désinformations, climat, travail, rencontres, signaux, projets, plaisirs, sommeils, rêves, fatigues.» Tel est le programme que se fixe d'emblée Sollers.
Sur le plan des événements, son journal est placé sous le signe de l'affaire Monica Lewinsky: c'est le feuilleton de l'année, un leitmotiv «délirant, «loufoque», offrant à Sollers, qui n'en demandait pas tant, des commentaires, tout à fait à sa main, sur le triomphe mêlé du «Spectacle» et du puritanisme. Les Américains, note-t-il par exemple à propos du «petit éjaculateur oblique de la Maison-Blanche», «aiment les confessions publiques, les actes de contrition, l'aspiration à la rédemption. Obscénité totale. Clinton, d'ailleurs, aurait pu pleurer: ça manque. Impression de débilité provinciale. La mondialisation est une province aggravée». Ou encore: «La sexualité et la religiosité yankees, sous toutes leurs formes, sont donc là à ciel ouvert. Infection p