Menu
Libération

Face aux piles. Au Salon (du livre)

Article réservé aux abonnés
publié le 25 mars 1999 à 0h17

Au soir de jeudi (on inaugure), c'est tout d'abord et bizarrement,

face à l'entrée principale, des tuniques bleu sombre et incongrues qui attirent l'oeil; sous un auvent, elles contiennent une maigre troupe de travailleurs de l'édition, venus protester là contre, notamment, un projet de convention collective «au rabais». Juste parqués comme un troupeau d'ovins; pas de cris, rien de bousculade ni a fortiori de horions; interdit de manifester ­ point. Les gens d'armes machinaux contiennent les manifestants résignés. Pour l'ambiance, la pluie n'arrange rien.

La foule passe les portes en masse, à gros bouillons mouillés. Il y a suffisamment d'accès et, en conséquence, pas de queue. Pas d'odeur non plus; les chimistes ont mis au point d'efficaces détergents afin de faire oublier que, quatre jours auparavant, ces halles hospitalières à la culture l'étaient à l'agriculture (1). Pour s'égoutter, on va naturellement chez Libération. Un vieux jeune homme blond et probablement lepéniste, déguisé en lecteur innocent, d'entrée vous interpelle; il joue au con, demande bruyamment «ce que Mégret a fait pour séduire Libé». On le congédie avec lassitude. Décidément, ça ne va pas fort. Allons plutôt boire.

On boit beaucoup, à la soirée inaugurale du Salon du livre. Comme ces beuveries sont rituelles et qu'à ce rite on s'est déjà fait prendre, on se méfiera, car «le champagne coule à flots», ainsi que l'impriment nombre de mauvais auteurs dont les patronymes s'affichent en longues listes déprimant