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Critique

Critique du jugement. Le rôle de l'historien et du juge peuvent devenir interchangeables alors que reste masqué le caractère politique du jugement historique. Un essai contre l'air du temps de Daniel Bensaïd. Daniel bensaïd, Qui est le Juge? Pour en finir avec le tribunal de l'Histoire, Fayard, 264 pp., 120 F. Eloge de la résistance à l'air du temps, Entretien avec Philippe Petit, Textuel, 126 pp., 79 F.

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publié le 15 avril 1999 à 0h44

Militant de la Ligue communiste, maître de conférences de

philosophie à l'université Paris-VIII, Daniel Bensaïd n'est pas vraiment un adepte de la division du travail. Aussi peut-il endosser aisément la définition qu'Althusser avait découpée jadis pour lui-même d'«agitateur politique en philosophie». A tout prendre, il se voit mieux en «intellectuel messianique», au sens donné à cette expression par Walter Benjamin. Non pas donc en doux prophète d'un futur où les injustices et les malheurs seraient finalement rachetés, mais en veilleur inquiet du présent qui, annonçant sans cesse que le temps presse, se tient prêt, disponible, dans une attente active, à la venue du nouveau, à l'irruption du possible. Ce possible, Bensaïd le veut ouvert aussi pour le passé, et c'est ainsi un autre aspect de l'engagement et de la théorie de l'histoire benjaminiens qu'il fait siens. Le possible pouvant se faufiler, à chaque instant, dans l'événement, cela revient à dire que les événements historiques auraient pu prendre une autre tournure. Dès lors, on peut suspendre le jugement de l'Histoire, voire s'y opposer, pour donner encore une chance aux insurgés et rendre justice aux histoires des vaincus. Au jugement, pénal, historique, politique, et à leur articulations réciproques, Daniel Bensaïd consacre Qui est le Juge?, alors qu'Eloge de la résistance à l'air du temps, un livre d'entretiens avec Philippe Petit, est plutôt axé sur la crise et le nécessaire retour de la politique.

Les procès Papon, B