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Libération
Critique

De l'eau au Moulin

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En évitant les pièges de la mémoire, celui qui fut son secrétaire particulier a rédigé une biographie scrupuleuse du préfet martyr de la Résistance.
publié le 22 avril 1999 à 0h24

Après ceux de Pierre Péan et Jacques Baynac il y a six mois, voici un nouveau Jean Moulin de Daniel Cordier. Au rebours du premier, Daniel Cordier refuse d'explorer la vie privée de Jean Moulin, et de scruter trop avant l'itinéraire d'un homme fortement engagé dans le Front populaire et l'aide aux républicains espagnols. Quant au second, il en réfute radicalement la thèse - un Jean Moulin trahissant de Gaulle pour les Américains. La nouvelle somme de Daniel Cordier ne succède pas aux trois tomes volumineux qu'il a déjà consacrés à Jean Moulin. Il s'agit plutôt d'une synthèse de mille pages destinée à un grand public parfois égaré par les polémiques sulfureuses entourant la mémoire de son ancien patron. Engagé à 19 ans dans les Forces françaises libres, Daniel Cordier devenait en effet secrétaire de Moulin, et jouait un rôle actif dans la délégation chargée à Paris de représenter le général de Gaulle. Les attaques que Henri Frenay, figure emblématique de la Résistance, porta en 1977 contre Moulin - accusé selon lui d'avoir servi la cause communiste - poussèrent cet homme discret, galeriste averti mais non historien de formation, à se lancer dans une biographie exhaustive de la victime de Klaus Barbie. Témoin et acteur, Cordier a connu les hommes dont il retrace la geste. Malgré ce rare privilège, en historien scrupuleux, il se défie des pièges de la mémoire et s'appuie dans ses travaux sur un corpus exceptionnel de documents (archives de la délégation, sources anglaises