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Libération
Critique

Le complexe de Hanoi

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Philip Roth décrit les ravages de la guerre du Viêt-nam dans les consciences en s'attachant au destin d'une famille: «Pastorale américaine» ou l'autopsie d'un échec.
publié le 29 avril 1999 à 0h30

Jusqu'ici, la plupart des livres ou des films américains inspirés de la guerre du Viêt-nam se déroulaient sur le terrain même des opérations ou insistaient sur les difficultés de réinsertion des anciens combattants. Pastorale américaine, le vingtième ouvrage traduit de Philip Roth, met en scène un côté peu traité du conflit: les conséquences de la guerre sur les Américains moyens et le basculement d'une partie de la jeunesse d'alors dans l'action politique, et parfois même l'extrémisme activiste. A la fin des années 60, le groupuscule des Weathermen se livra ainsi à divers attentats meurtriers sur le sol américain. Philip Roth avait alors des amis à Greenwich Village, le quartier underground de New York, qui habitaient en face d'une maison que les locataires firent un jour sauter en confectionnant dans la cave des bombes artisanales. L'écrivain connaissait bien les parents d'une jeune terroriste qui avait survécu à l'explosion et vivait depuis dans la clandestinité. Ces événements lui fournirent le point de départ de Pastorale américaine, commencé dès 1972, abandonné au bout de 70 pages et publié seulement en 1997: pourquoi un tel délai? Parce que, expliquait l'écrivain dans un article publié au moment de la sortie du livre aux Etats-Unis (et repris par le Monde du 23 avril dernier), «dès que je regardais le journal du soir à la télé, j'avais, moi aussi, envie de faire sauter quelque chose». Et surtout, parce que, ajoutait-il, s'il commençait à «comprendre ce qui se passait