Foucaldiennes, ces Réflexions sur la question gay de Didier Eribon
les sont à plus d'un titre. Parce que, du point de vue historique, elles épousent, tout en le critiquant, le découpage temporel avancé (et abandonné) par Michel Foucault quant à l'apparition de la notion moderne d'homosexualité au milieu du siècle dernier, et son évolution jusqu'à l'actuelle prise de parole gay. Parce que, en termes de méthodes, elles adoptent (en partie) le statut du «discours en retour» de l'auteur de la Volonté de savoir, quand il affirme que la parole homosexuelle a pu s'inventer en reprenant à son compte les catégories de pensée qu'elle entendait combattre (et qui la combattaient) pour en inverser la signification. Foucaldien, enfin, cet essai l'est aussi par son ambition philosophique, tenant à une volonté de dégager l'horizon stratégique d'une politique de la condition gay et de constituer une éthique du sujet homosexuel qui trouve dans l'assujettissement dans la honte donc le lieu originaire de l'affirmation créatrice de sa propre liberté. Cependant, les références de ce livre exigeant qui détonne parmi les balbutiements de la recherche homosexuelle française sont bien plus larges et vont de Sartre à Bourdieu, de Goffman, à Hannah Arendt, tout en reconnaissant une dette à l'égard de quelques auteurs américains tels Eve Kosofski Sedgwick, Judith Butler, David Halperin" Journaliste au Nouvel Observateur, essayiste, auteur d'une biographie de référence de Michel Foucault (Fayard,