On peut, à l'ancienne, concevoir une histoire de la philosophie
comme une doxographie, ou la collection de «ce qu'ont dit» les philosophes. Ou bien voir, dans l'enchaînement des théories qu'elle propose, le «dévoilement progressif de la vérité». Ou encore reconstrui-re après coup des «moments de vérité» en fonction des préoccupations théoriques, esthétiques, voire politiques, du présent. Mais s'il y a une histoire des histoires de la philosophie, c'est que chacune d'elles porte à la fois une conception de l'histoire et une définition de la philosophie à une époque donnée de sa propre histoire. Bien différentes, si on s'en tient aux plus courantes, sont donc l'Histoire de la philosophie d'Emile Bréhier («Quadrige», PUF), qui sur la pensée contemporaine est très insuffisante, et l'Histoire de la philosophie dirigée par François Châtelet (Hachette, Marabout), qui ne se contente pas d'un découpage chrono-logique. De celle, de référence, qu'avec Brice Parain il publia (1969-1974) en Pléiade avec le concours, entre autres, de Pierre Aubenque, Henri Corbin, Maurice de Gandillac, Claude Lefort, Michel Serres, Pierre Kaufmann, Henri Lefebvre, Jean Starobinski Yvon Belaval disait modeste-
ment qu'elle était «une suite chronologique d'informations». Elle ressemble plutôt à un fleuve infini qui, de l'Orient, de la pensée préphilosophique en Egypte ou en Mésopotamie, par l'Antiquité grecque, le Moyen Age, la Renaissance, l'âge classique, le siècle des Lumières, Kant, etc., arrive à