Si l'on se sent mou, anémié, à côté de la plaque, et que l'on a
envie que cela s'aggrave, l'oeil du lézard, l'unique roman de Richard Meyers, alias Richard Hell, est recommandable. Il a au moins le mérite de ne pas rendre euphorique, de ne pas donner envie d'entreprendre ne serait-ce qu'une vaisselle, bref, de ne doper personne, sauf son héros, peut-être, dont l'unique préoccupation est de se défoncer. Billy fait partie d'un groupe qui a connu son heure de gloire, comme d'ailleurs Richard Hell lui-même, avec Voidoids et leur titre Blank generation, hymne punk datant de 1977 et même pas totalement oublié aujourd'hui. Une petite amie, un éditeur, une voiture, de très belles autoroutes, des motels impeccablement sinistres, un continent, un appareil photo, un stylo, des feuilles de papier à remplir de mots qui disent ce qu'on voit, ça s'appelle écrire un livre de commande, et c'est justement ce qui ce qui tombe sur la tête du protagoniste mais pas dans cet ordre, car l'oeil du lézard est construit très linéairement, un peu comme une autoroute.
Donc, Billy évolue dans un petit enfer personnel douillet, composé d'un canapé vert, d'un frigo désert, de journées «entamées par erreur», mais rythmées régulièrement par des «fixes», et il y a des gens autour de lui qui estiment ses capacités. Son cocon le plonge dans une telle solitude que sa voix est «rouillée» et que «le réglage automatique de son volume ne fonctionne plus». Un éditeur lui propose un marché: «Je voudrais que tu ramènes à